c'est la rentrée et vivement la fin recommence, pour cette saison, une équipe de chroniqueurs se relayera, un peu comme une tournante et on sait que ça te plait.
voici la première émission de la saison présentée par grorille et jules qui font un bilan de ce qu'ils ont écouté cet été
VIVEMENT LA FIN
blog de bon goût, poli, élégant et raffiné pour ton éducation musicale.
vendredi, novembre 15, 2013
Nimä Skill
Espiègle
et esthète aux vinyles, le bonhomme est une forte tête qui n'a pas
la langue dans sa poche, loin de là. Influence, mentor, compagnon de
route, ami de la famille, caution sémite, mec de gauche, vendeur de
disque, bref un gros poteau de Vivement La Fin. il est logique que
nous donnions la parole à Nimä Skill, invité il y a quelques temps
dans les studios d'H.D.R. par nos soins.
Au
niveau local il est décrié par ses pairs, ailleurs on ne parle pas
assez de lui, adaptable, inventif et très certainement fou, il est
largement mérité qu'il s'exprime en sécurité, une interview peut
être pas à bâtons rompus mais au moins honnête, comme à la
chasse des requins blancs, il faut laisser sa chance à l'otarie et
malgré des dents aiguisées, Monsieur Skill ne demande qu'à parler:
Présente
toi en quelques mots: depuis combien de temps tu mixes,
qu'est
ce qui t'y a amené?
Nimä
Skill, DJ depuis 1994, Vinyl DJ, Label owner, producteur de musiques
quelquefois. J'ai baigné dans la culture vinyl depuis gosse.
Soul/Funk/Disco, HipHop, Electro, Dub (House et Techno ensuite). on
m'a foutu "Rock It" De Herbie Hancock dans les oreilles à
3 ans, et un de mes oncles (ancien DJ) m'a offert, pour mes 13 ans,
ses 2 MK2 et son mixer. Je collectionne les vinyls depuis ce temps,
j'ai appris les origines de ce que je joue et écoute, choses très
importantes et occultées souvent par les newbies et le deejaying est
mon truc !
Pour
toi, un bon morceau c'est quoi ?
C'est
un truc avec une grosse patte perso. Original, innovant ou
complètement barré mais qui ne ressemble pas aux 10 000 copycats
qui sortent chaque semaine. Le genre sur lequel tu tombes
malheureusement pas souvent... J'ai du mal avec les copieurs à
l'infini...
Parle
nous de ton label et des artistes que tu choisis: qu'est ce
qui
te décide à mettre le travail de quelqu'un en valeur ?
Mon
label c'est Aesthetic Circle Records. C'est une plateforme qui
propose de la musique gratuitement (ou donation) depuis 2009. Au
début, je pensais le reserver aux centaines de mes prods qui
dormaient sur des Minidisc. Puis j'ai pris le truc un peu plus au
sérieux et décidé de sortir les tracks de mes potes producteurs
qui, pour certains, faisaient des choses extras sans les sortir. Par
chance et grâce aux internets, j'ai eu ensuite la chance de sortir
le travail d'artistes plus renommés. J'en suis à la 25ème sorties
à raison d'une release tous les deux mois environ. 100% Digital et
gratuit parce que, d'après moi, tous ce qui est dispo en fichier
informatique se doit d'etre Free (ou au moins de laisser le choix aux
consommateurs). Les premières sorties en vinyl se feront d'ici 6
mois environ.
Tu as aussi un podcast avec des invités: abstract broadcast, quel en
est
le principe et la motivation
En
fait, ABSTRACT BROADCAST, c'est une fausse emission de radio que je
met en ligne toutes les deux semaines environ. Je les réalise
entièrement avec mes disques, dans tous les styles, dans le but de
faire découvrir des choses aux gens.Ensuite j'y rajoute faux jingles
et quelques spoken words pour coller à l'idée d'emission de radio.
J'ai toujours voulu faire de la radio et comme je n'ai pas eu l'occaz
d'en faire en vrai depuis le lycée, j'ai fais "genre" !
MIXTÜRESERIES, c'est une serie de podcasts avec des invités, des DJ's que
je respecte et qui me plaise !
Je
souhaite avec cette série faire découvrir les mondes de ces
artistes à fortes personnalités.
Tu fais aussi de la production, parle nous de ton processus de
création
Je
fabrique des sons avec des moyens dérisoires et un peu simplistes
mais le défi me plaît! Je fais de la musique depuis 1999 environ.
Comme je disais plus haut, j'avais des centaines de morceaux en stock
dans beaucoup de styles différents.Du coup, j'ai "monté"
quelques projets sous divers pseudos pour sortir mes trucs !HipHop,
Hardcore/Breakcore, Noise, House, Bass, Techno... etc tout ou presque
y passe.
Je
ne m'étale que très rarement sur tous ces projets car dans le
milieu Techno/House version 3.0, les gens ont un peu de mal avec la
diversité musicale dans sa globalité... Après ce n'est pas ma
passion principale mais je trouve que produire sa musique est quelque
chose de tellement personnel que j'ai du mal à le partager.
Que pense tu du milieu de la nuit à l'heure actuelle, à rouen et en
france
Y'a
un milieu de la nuit à Rouen ? Non, je rigole mais c'est presque ça.
Je suis là depuis 10 ans ; j'ai monté des plateaux, organisé des
soirées ; essayé de promouvoir les musiques électroniques à Rouen
mais à force de me heurter à des murs,j'ai un peu laissé tomber le
truc. Il y a une relève actuellement, avec des jeunes gens très
biens qui organisent des choses très solides (big up Brimfool) mais
le reste sonne quelque peu creux.
Notamment
avec d'autres qui n'ont toujours pas compris que le
"trasho-comico-tragico-pseudo-electro", enfin les trucs
"à-la" Justice, EdBanger et consorts d'il y a 6 ans, c'est
mort depuis longtemps... Bref, la province dans toute sa splendeur !
Rouen est pourtant une ville bourrée de talents... mais qui
s'épanouissent ailleurs... malheureusement... Et puis, je suis rangé
maintenant et j'ai une vie bien remplie. Je ne sors pratiquement que
quand je joue ou pour voir les amis qui jouent. Le déformé et
l'amateurisme face à ce que je défends font aussi que je ne mets
pas les pieds n'importe où ou avec n'importe qui... Je suis aussi
connu pour mon franc parler et ça, c'est pas le bienvenue dans ce
monde :)
Un mot pour tes détracteurs
YOU
MUST LEARN
hein? voila un mot qu'il faut que tu prennes le temps de relire, plusieurs fois, proprement, prends le temps d'y réfléchir...
en bonus, voila la playlist dont il nous a gratifiés lors de son passage dans l'émission:
1. François de Roubaix - Indicatif Télé-Zaïre (EmArcy)
2. Gunnar Haslam - He Came From the Border (LIES)
3. Vexx feat Kid B - Killa In Disguise (Vexx Music)
4. Urban Tribe - Social Theorist (Mo'Wax)
5. Dabrye - Smoking The Edge (Ghostly International)
6. Jaquarius - Monster Laboratory (Aesthetic Circle Records)
7. Elecktroids - Stun Gun (Warp)
8. Nimä Skill - Come Close (Unreleased)
9. DJ Slugo - Wouldn't You Like To Be A Hoe (Dance Mania)
10. DJ Rashad - I Don't Give a Fuck (Hyperdub Rds)
11. Digital Mystikz - B (DMZ)
jeudi, novembre 14, 2013
JEWelZ
Le rap a de toute éternité été
perçu par les médias comme une musique de contestation sociale,
issue d'un contexte économique difficile, fruit de l'immigration et
du métissage, ce en Amérique autant qu'en Europe. Cette culture vue
comme un moyen d'expression émancipée des noirs, des arabes ou des
latinos est cependant un vecteur d'universalité et il n'y a pas
besoin d'être noir, marron, jaune ou vert pour se reconnaître dans
son énergie et ses valeurs.
Aujourd'hui, je vais donc ouvrir une
parenthèse pour mettre en évidence ceux qui ont été décrits
comme des éminences grises satanistes du milieu du disque, je
prendrai comme exemple les propos d'Ice Cube concernant Jerry Heller,
manager de N.W.A. Et co-fondateur du label Ruthless Records avec Eazy
E . Le glaçon a clairement comparé son ancien manager au diable et
au long de sa carrière, il n'aura de cesse de le pointer du doigt
dans ses morceaux.
Commençons par Blood Of Abrahm, groupe
signé sur le label évoqué plus haut, Ruthless. Ce groupe composé
de falashas est un appel à l'union entre les juifs et les noirs. Le
jeune Will 1X, mieux connu aujourd'hui comme Will.i.am,
y fait ses premières armes sur disques au coté de Eazy E qui fait
une apparition sur le singles « Niggaz And Jews (Some Say
Kikes) ». Annonçant clairement la couleur, l'intro est un
enregistrement d'un discours d'un membre du ku klux klan lançé dans
une diatribe antisémite.
Passons les plus connus
pour nous consacrer à des MC's un peu plus underground. Necro
par exemple expose son judaïsme de façon choquante en l'opposant à
la culture américaine W.A.S.P. ancrée dans le protestantisme. Des
punchlines comme « I drink bloody mary from Jesus' mom's
pussy » ou bien le « I wish you a merry crucifixion,
Jesus ain't nothing but a corpse to me » ou bien le morceau
« Jewish Gangsters » montrent non seulement son
antagonisme par rapport aux valeurs chrétiennes de son pays mais
aussi un attachement profond à son identité religieuse et
culturelle. Dans celui ci, il parle sans détour de sa grand mère survivante de l'holocauste et aussi de son père qui est arrivé à new york avec une mentalité militaire héritée de la guerre des six jours.
Sous un jour plus parodique, le
québécois SoCalled n'en affiche pas moins ses couleurs car même
sur un ton humoristique, ses racines restent omniprésentes, que ce
soit dans l'utilisation de samples de musique traditionnelles comme
le klezmer ou certains mots d'argot empruntés à l'hébreu ou au
yiddish. Dans une interview pour le magazine Mondomix il l'évoque
ainsi: « J'ai
commencé à créer mes propres jewishs
beats,
à partir de tout un tas de sources : théâtre yiddish, chant
litturgique, musiques hassidiques, israéliennes, klezmer, folklore
roumain... Mais ça ne me suffisait pas. Il me fallait apprendre à
jouer ces musiques, pour comprendre d'où venait la force brute de
cette pulsation, de ces mélodies. C'est capital. Chaque DJ devrait
se plonger à la source, ne pas se contenter de piller les sons à
l'aveugle. C'est comme coucher avec une fille sans connaitre ni son
nom, ni son âge. Criminel. »
Le paroxysme parodique identitaire est
atteint par le groupe 2 Live Jews, parodie de 2 Live Crew, qui
reprendra « Hava Nagila » version miami bass ou bien le
morceau titre de leur album « As Kösher As They Wanna Be »
qui en fin de compte n'est qu'une liste de clichés divers et variés
mais tournée avec un second degré et une dérision qui résonnent
comme un duo entre Larry David et Woody Allen sous weed et bière.
Loin des protest songs d'un Robert
Zimmerman ou d'un Leonard Cohen, ces MCs juifs se foutent de
s'inscrire dans leur époque ou leur société pour plutôt jeter
leur patrimoine à la gueule du mouvement hip hop, s'affichant
parfois comme une minorité dans la minorité malgré de francs
succès comme Drake ou les Beastie Boys.
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